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mercredi 2 mai 2007
2 commentaires

DERAPAGES CONTRÔLES

Si les précédents débats télévisés ont peu influé sur l'issue du scrutin, le camp socialiste veut croire que celui-ci pourrait être déterminant. Tout l'enjeu pour la candidate est de rappeler les outrances du discours de son adversaire, "l'homme du passif", qui a prévu de rester bien tranquille et courtois sur TF1.

Chirac le répétait depuis des années dans les couloirs de l'Elysée : Sarkozy est un "excité", capable de déraper verbalement ou de d'exploser violemment tout à coup hors de proportion. C'est bien pour gommer cette image que le candidat répète à l'envi ces derniers jours qu'il se prépare "sereinement" à un "débat digne" placé sous le signe du "respect", et qu'il s'emploie à banaliser la portée de l'évènement, puisqu'il a intérêt au statu quo et à ne pas prendre de risque, afin de conserver son avance en terme de voix, que pronostiquent actuellement tous les sondages. Des déclarations empathiques et un double discours qui agacent particulièrement dans le camp adverse, tant elles sont en décalage avec la violence du discours de Nicolas Sarkozy en meeting, encore récemment dimanche dernier à Bercy. Du côté socialiste, on veut croire que la grand-messe médiatique présidentielle pourrait encore changer la donne. Ainsi, François Hollande répétait le 30 avril à son état-major que "le débat serait déterminant et pourrait faire basculer 2% d'électeurs". Ségolène Royal n'a donc d'autre choix stratégique que l'offensive, pour faire tomber le masque du challenger UMP -qu'elle avait qualifié d'hystérique et de dangereux voilà quelques semaines- en stigmatisant à nouveau son discours de "haine" et de division des Français. Mais l'exercice semble périlleux. Si l'on a jamais prouvé les bénéfices en terme de voix d'une "petite phrase", l'agressivité semble en revanche peser en terme d'image dans l'opinion. Et à vouloir trop pousser l'adversaire dans ses retranchements, on peut passer soi même pour un responsable politique qui ne sait pas tenir ses nerfs...

"Pas ce ton de roquet !"

S'il est probable qu'un "dérapage" (cf Kärcher, racaille) puisse coûter des voix d'électeurs indécis, faut-il croire qu'une bonne réplique peut s'en attirer ? La légende est tenace tant sont passées à la postérité des phrases marquantes à chacun des grands débats : "le monopole du coeur" en 1974 de Giscard à Mitterrand, la réplique en retour "vous êtes l'homme du passif" en 1981, etc. Mais les mêmes techniques ne produisent pas les mêmes effets. Ainsi, en 1981, lors du débat sur le mark, Mitterrand mouche VGE en lui glissant "je ne suis pas votre élève, vous n'êtes pas le président de la République". Sept ans plus tard, Chirac essaie la même technique mais l'effet tombe à plat, en tentant un "ce soir, je suis pas le premier ministre et vous n'êtes pas le président de la France" auquel répond en souriant avec ruse : "Mais vous avez totalement raison M. le premier ministre". De même, la technique du mépris est à double tranchant. Si elle avait joué en faveur de Mitterrand face à un Chirac visiblement très agité, lors de l'échange sur les otages et l'affaire Gordji -tellement tendu que les journalistes pensait que l'un d'eux allait quitter la table-, elle avait pénalisé Fabius alors à Matignon, face à l'actuel président. "Mais enfin vous parlez au premier ministre de la France !" s'était offusqué le socialiste, d'un ton condescendant. "Ne prenez pas avec moi ce ton de roquet", avait rétorqué Jacques Chirac. Le mot avait fait florès et relancé le maire de Paris dans l'opinion.

Effet marginal sur les urnes

S'il faut s'attendre à un score d'audience massif (il était de 23 milllions de télespectateurs en 1974, 17 millions en 1995), c'est d'une part parce que ces débats sont rares : quatre sous la Ve République, dont le dernier date de 12 ans déjà. Ensuite, les candidats actuels sont des primo postulants qui ne se sont jamais affrontés (sauf lors d'une soirée électorale en 1993, et le ton avait été franchement houleux). Enfin, depuis très longtemps n'avait pas eu lieu l'affrontement de deux personnalités et projets aussi différents : en 1995, la rencontre Chirac/Jospin était cordiale, et si l'on peut dire pratiquement sur le même thème de la fracture sociale, et en 2002, il n'y avait pas eu de débat. Mais cet engouement ne signifie pas que les lignes vont bouger. Comme le rappelle par exemple le politogue Thierry Vedel dans son ouvrage "Comment devient-on président de la République ?" : "les recherches sur les débats politiques suggèrent que ceux-ci n’ont que très peu d’effets sur les intentions de vote, mais tendent plutôt à renforcer les dispositions pré-existantes des électeurs. On a souvent noté que les citoyens qui regardaient les débats politiques télévisés étaient des citoyens plutôt politisés, aux opinions déjà bien établies, tandis que les citoyens qui pourraient être les plus sensibles à l’influence des débats les regardaient en général très peu".

Mrs Nice vs Action Man

Si les Français sont si friands de ses confrontations, c'est aussi parce que l'Hexagone a une culture de la joute verbale assez ancrée. D'ailleurs, la France a été un pays précurseur en domaine de débats télévisés. Ils sont plus rares dans les autres pays européens, comme en Allemagne les élections mettent en avant des appareils partisans plus que des personnalités, voire n'existent pas du tout en Grande-Bretagne. Mais faut-il réduire aujourd'hui ces débats, et leur utilité, à des confrontations d'images, comme le fait The Guardian aujourd'hui, en opposant "Mrs Nice" à Action man" ? A des "coups bas" comme dit le redouter l'équipe sarkozyste, selon Le Canard enchaîné ? Il semble que le débat de fond ait bien lieu : le candidat UMP devrait axer ses attaques sur le programme économique (grâce à des fiches d'Eric Besson !), et la candidate sur le bilan du gouvernement Villepin. Mais il n'est pas interdit de souhaiter de beaux moments d'éloquence comme cet échange de 1974. A Giscard, Mitterrand, cinglant : "Pas de préciosité !". Giscard : "Vous vous êtes montré plus littéraire que moi dans cette campagne." Mitterrand : "Je ne suis pas Flaubert." Giscard : "Peut-être que vos électeurs vous permettront de le devenir...". Mais parfois les "coups bas" échappent aux télespectateurs. Ainsi, plus perfidement, VGE citant, étonnament toujours la même ville pour ses exemples, pour destabiliser Mitterrand. C'était la ville où vivait alors une certaine Anne Pingeot, mère de Mazarine.

 

 

alexandre
a dit à
jeudi 3 mai 2007

Segolene a été brillante. Audacieuse sur la forme. Précise et engagée sur le fond : ecologie, partage du temps de travail, services publics, croissance, etc.

 

acebasho
a dit à
jeudi 3 mai 2007

L'article me semble assez lucide bien que peu impartial